Presse, Juillet 2018
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Après Daniel Buren, Xavier Veilhan ou Felice Varini, les toits terrasses de la Cité radieuse de Le Corbusier accueillent, jusqu'au 30 septembre, l'exposition Untitled. L'artiste suisse présente trois œuvres pensées comme un ensemble, à découvrir au Mamo, le «Marseille Modulor».
Par Agathe Moreaux
Chaleur écrasante, couleurs chamarrées. Les plaques peintes iridescentes d’Olivier Mosset prennent le soleil au Mamo. On ne présente plus le projet fou du designer marseillais Ora-ïto qui rachetait il y a 6 ans l’ancienne salle de gymnastique et le solarium de la Cité radieuse de Le Corbusier pour en faire un lieu de création artistique. Au-dessus des 337 appartements et à côté de la pataugeoire de la crèche est né le Mamo pour «Marseille Modulor». Classé patrimoine mondial de l’Unesco en 2016, la ville verticale du Corbu se voit pourvoir chaque été d’œuvres uniques commandées à des artistes de renom. «Un lieu refuge, un projet chronophage et coûteux qui nous permet d’exposer des grands maîtres l’été et de donner une impulsion aux jeunes artistes exposés l’hiver», explique Ora-ïto. Après Daniel Buren, Xavier Veilhan, Dan Graham, Jean-Pierre Raynaud et Felice Varini, le lieu accueille pour sa sixième année Olivier Mosset.
Issu du groupe BMPT (pour Buren, Mosset, Parmentier et Toroni), Olivier Mosset (né en 1944, à Berne) questionne la couleur. Son coup d’éclat: un cercle noir tracé au centre d’une toile blanche qu’il présente avec ses compères au Salon de la jeune peinture en 1967. En peintres iconoclastes, ils imposent une réflexion sur la peinture pour elle-même, détachée de la notion de signifiant. De cette période d’expérimentation, il conserve la volonté d’une confrontation à la peinture de chevalet. Dès 1977, l’artiste part vivre aux États-Unis et poursuit son questionnement autour du monochrome. Des toiles centrées sur la couleur naissent de ses expérimentations.
Dernièrement, Olivier Mosset exposait, à Los Angeles sur le toit de la galerie 6817, un panneau d’affichage pourvu d’une matière très particulière. La même que celle appliquée sur les plaques de métal qu’il présente sur le toit terrasse du Mamo cet été. «Une sorte de peinture caméléon», explique-t-il. En réalité, un revêtement industriel pour carrosserie cuit après son application, ce qui lui donne son iridescence et renforce ses pigments métalliques.
Les deux fresques de 5 et 18 mètres de long arborent des couleurs dégradées du bleu au rose en passant par le vert qui se transforment au gré des reflets changeants du soleil. L’artiste biker cultive aussi une passion pour la moto, ses codes et son esthétique. Troisième champ d’action au Mamo: une Harley Davidson 74′ Panhead, datée de 1957, vêtue de la même peinture cuite. Elle est exposée dans l’espace blanc immaculé du gymnase entre référence au ready-made et au pop art. Une installation un peu moins convaincante que celles de la terrasse.
Le travail de Mosset s’inscrit dans une réflexion récente sur la couleur changeante. «Je ne crois pas au monochrome. La couleur réagit toujours à la lumière», explique-t-il. Les trois œuvres exposées au Mamo s’inscrivent par ailleurs dans la contrainte d’un lieu immuable. D’où l’obligation de peindre des plaques sans pouvoir toucher aux murs. Mais de cet interdit naît l’intérêt d’une collaboration posthume avec Le Corbusier. Un dialogue à deux cerveaux entre Mosset et celui qu’il qualifie de «moderne ancien». Cette année, l’artiste suisse relève le défi haut la main et réussit à produire une matière couleur incandescente qui prend corps dans le ciel de Marseille.
Untitled d’Olivier Mosset au Mamo de Marseille jusqu’au 30 septembre. Entrée libre.